Expositions
Mot du commissaire
Exposition centrale
Exposition de la relève
Expositions tenues par les collaborateurs
Exposition internationale d'art postal
Mot du commissaire
La Mélodie du bonheur
L’invitation qui m’a été lancée
par la Manifestation internationale d’art de Québec
n’était pas sans comporter quelques risques.
La prise en charge d’une telle commande, à
propos d’un sujet aussi insaisissable que le bonheur,
n’allait pas de soi étant donné
surtout la forte tendance de l’art actuel à
la critique, à ce que certains ont même
identifié comme de la morosité vu le goût
répandu pour le pathos ou encore la remise en
cause des repères courants. Dans de telles circonstances,
traiter du bonheur ne tombe pas sous le sens. Encore
moins, si l’on considère l’actualité
peu réjouissante dans le monde. Le danger court
de se faire taxer d’aveuglement face aux enjeux
politiques et sociaux actuels, donc d’ignorer
l’état présent du monde.
La difficulté est double puisqu’il faut
aussi tenir compte des développements récents
du discours sur l’art au Québec comme à
l’échelle internationale. Cette actualité
a vu les expositions sur le quotidien se multiplier.
De nombreuses autres présentations ont traité
du banal ou de la légèreté, malgré
la maladroite métaphore thérapeutique
que cette notion implique : la légèreté
a été présentée comme un
« antidote » à la supposée
morosité ambiante de l’art contemporain.
À la liste s’ajoute un élément
repéré à plusieurs reprises : le
ludique1.
Certes, le ludique n’est pas le bonheur. Au-delà
des attitudes déployées par les œuvres
ludiques ou des effets brefs et ponctuels procurés
par elles, plus proches de l’humour, du bien-être
ou d’une douce excitation, la notion de bonheur
soulève des questions pour lesquelles les réponses
ne viennent pas aisément. D’abord, qu’est-ce
que le bonheur ? Il ne sera pas proposé ici de
guide ou de mode d’emploi comme ceux rédigés
par Alain (Propos sur le bonheur) ou par le
dalaï-lama (L’Art du bonheur).
La Manif d’art et son thème, « Bonheur
et simulacres », seront plutôt l’occasion
de montrer différents états pouvant se
rapporter au bonheur, pour autant qu’il existe.
Aujourd’hui, la publicité colonise notre
conception du bonheur, lui donne forme et l’enrôle
au sein d’un modèle économique.
Objectif perpétuellement reculé, inatteignable
par définition, le bonheur viendrait lorsque
l’anxiété, l’insécurité,
la colère et le découragement sont vaincus.
Le bonheur est toutefois l’objet d’une constante
envie, le commencement d’une quête jamais
complétée, un profond besoin de combler
un manque toujours ravivé. Il est, d’autres
l’ont dit, la satisfaction vers quoi tendent toutes
les satisfactions, le plaisir complet sans lequel tout
plaisir demeure incomplet.
Les Sirènes et leur chant ne promettent-elles
pas un bonheur qui toujours s’éloigne ?
« Menteuses quand elles chantaient, trompeuses
quand elles soupiraient, fictives quand on les touchait
», tranche Blanchot à leur sujet2.
À leur approche, La Mélodie du bonheur3
continue de se faire entendre sans que le chant
soit jamais réellement entendu, la musique devenant
silence dès que l’homme entre en leur domaine.
Continuellement, de nouvelles Îles de Nulle-Part
se présentent à la vue.
Trois vecteurs articulent la thématique «
Bonheur et simulacres ». D’abord, la critique
du bonheur - l’exposition de sa face cachée,
de sa faillite et de l’aveuglement qu’il
provoque. Le « bonheur d’expression »,
tel que défini en esthétique pour une
œuvre où se mesure un contraste entre l’extrême
simplicité des moyens et l’effet artistique
appréciable, ouvre une autre dimension pour l’événement.
Enfin, et selon sa plus proche définition, le
bonheur sera abordé comme un événement
fortuit favorable.
Mais un événement centré sur le
bonheur ne saurait traiter la chose comme s’il
ne s’agissait que d’un thème. Chacun
cherche son petit bonheur quotidien, différent
du bonheur dont les penseurs essaient de définir
les orientations. Ces lancers légers4,
porteurs d’espoirs modestes et de fragiles certitudes,
ne sont pas du même ordre que les grandes approches
théoriques. Autrement dit, le bonheur ne saurait
être aussi abstrait qu’un thème,
fût-il rendu le plus palpable que possible par
une sélection d’œuvres d’art.
Aussi, les œuvres retenues pour cette seconde édition
de la Manif d’art auront-elles beaucoup à
offrir. Certaines feront don d’elles-mêmes
et permettront au visiteur de repartir avec une parcelle
de l’exposition. D’autres procureront des
expériences fortes, au profit d’une branche
de la théorie maladroitement nommée pragmatique.
La plupart des œuvres de cet événement
livrent une image de ce que peut être le bonheur,
offrant dans cet esprit des alternatives que d'aucuns
jugeront éminemment discutables, qui choqueront
peut-être certains visiteurs, mais qui rendent
compte dans l’ensemble des voies multiples dans
lesquelles peuvent se prolonger les sources du bonheur.
Bernard Lamarche
Commissaire
1. La ville d'accueil de la Manif d'art, Québec,
a été le lieu à l'automne 2001
d'une exposition importante, Le Ludique, orientée
autour de la notion de jeu. L'exposition s'est tenue
au Musée national des beaux-arts du Québec
du 27 septembre au 25 novembre. Elle sera reprise au
Musée d'art moderne Lille Métropole, à
Villeneuve-d'Ascq, du 11 avril au 24 août 2003.
2. Maurice Blanchot, Le livre à venir,
Gallimard (Folio/Essais), 1998 (1959), p. 11.
3. C'est ainsi qu'en français le titre de The
Sound of Music a été traduit.
4. Je reprends en le détournant le titre de l'ouvrage
de Normand de Bellefeuille.
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Exposition centrale
Le noyau des expositions de la Manif d’art réunit
une trentaine d’artistes de l’Amérique
du Nord et de l’Europe. Les artistes choisis sont
invités par le commissaire, Monsieur Bernard
Lamarche, ainsi que par le directeur général
et artistique de la Manifestation internationale d’art
de Québec, Monsieur Claude Bélanger. Tous
les noms sont retenus en fonction des trois axes autour
desquels s’articule le thème de cette année,
soit : la critique du bonheur, l’idée du
« bonheur d’expression » et, finalement,
le bonheur vu comme un événement fortuit
favorable.
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Exposition
de la relève
La vingtaine d’artistes qui présentent
leurs œuvres dans le cadre de cette exposition
ont été sélectionnés à
la suite d'un appel de dossiers. Tout en portant une
attention particulière aux jeunes pratiques,
le jury a arrêté son choix sur les travaux
liés au thème.
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Expositions tenues par les collaborateurs
À l’exposition centrale
vient se greffer un programme d'expositions ou d’activités
mises sur pied par les différents organismes
participants : Avatar,
centre VU, Engramme,
Galerie des arts visuels de l’Université Laval,
Institut Canadien de Québec (bibliothèque Gabrielle-Roy),
La chambre blanche,
Le Lieu, Les Productions Recto-Verso,
l’Œil de
Poisson, Materia,
Musée national
des beaux-arts du Québec.
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Exposition
internationale d'art postal
Présentée à la galerie de la bibliothèque
Gabrielle-Roy, l’exposition internationale d’art
postal est coordonnée par le responsable du Collectif Réparation de
Poésie, Monsieur Jean-Claude Gagnon. Fort
d’une expérience de plusieurs années
dans la pratique et l’organisation d’événements
d’art postal internationaux, Jean-Claude Gagnon
possède une impressionnante liste d’artistes
de renommée mondiale qui oeuvrent comme lui dans
le domaine de l’art postal.
Ces artistes ont été invités à
participer à la seconde édition de la
MANIF D’ART par le biais d’un appel de dossiers.
Leurs productions, liées au thème «
Bonheur et simulacres », sont exposées
à la galerie de la bibliothèque Gabrielle-Roy.
Le second volet de l’exposition s’adresse
aux jeunes de la grande région de Québec.
Les élèves des écoles primaires
et secondaires sont invités à réaliser
des cartes postales qui seront ensuite exposées
dans l'atrium de la bibliothèque Gabrielle-Roy
et dans celui de la galerie.
Les liens que le milieu des arts a tissés avec
celui de la poste ne date d’hier. En effet, plusieurs
artistes ont eu recours à la poste pour diffuser
leurs œuvres :
Entre la poste et l'art, il y a
une étroite
complicité. On se souvient des adresses en forme
de quatrains que Mallarmé écrivait sur
ses enveloppes. Avec Chaissac, Picasso, Matisse, Léger,
Braque et bien d'autres artistes qui décoraient
leurs missives, la lettre elle-même devient un
support de la création artistique. Cette seconde
nature donnée à la lettre, on la doit
aux Dadaïstes et Futuristes qui, dans les années
vingt, échangent des envois poétiques,
des collages, des lettres dont l'adresse était
rédigée sous forme de rébus. Héritiers
de ces courants artistiques et en butte à l'art
officiel des galeries, des créateurs, dans les
années soixante, utilisent l'institution postale
comme moyen de diffusion de leurs oeuvres. Ainsi, des
enveloppes décorées de tampons, des vignettes
personnalisées ainsi que des objets insolites
voyagent par la poste. Plus qu'un moyen de faire de
l'art, le mail art est un vecteur de communication. À côté de
cette expression artistique à laquelle la poste,
malgré elle, participe, des artistes ont puisé dans
le registre postal pour y trouver leur inspiration1.
1. [En ligne] http://perso.wanadoo.fr/reine.shad/mailart2.htm.
(page consultée le 8 novembre 2002)
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