« […] c’est un devoir envers les
autres que d’être heureux »
Alain, Propos sur le bonheur. La MANIF D’ART en est à sa seconde édition.
Le thème de cette année est « Bonheur
et simulacres ». Nous avons choisi le bonheur
(qui ne le choisirait pas), car d’une façon
générale il est devenu, avec l’avènement
de la société de consommation, le but
ultime, le marché le plus fleurissant de notre époque
(P. Bruckner). Il existe une littérature importante
sur le sujet, le décrivant avec méthode
et nous le proposant comme un objectif immédiatement
accessible, recettes à l’appui.
Mais le bonheur n’est pas donné. On fait
le plus souvent référence à une
quête en parlant du bonheur. Par exemple, pour
les chrétiens, le bonheur est d’hier (de
jadis) ou de demain, jamais d’aujourd’hui.
Pour eux, la recherche du bonheur reste inaccessible.
Dans le langage courant, il désigne un état
affectif à la fois délicieux et tranquille.
Ainsi nous avons juxtaposé la notion de « simulacre » à celle
de bonheur, pour bien laisser comprendre que rares
sont les artistes actuels qui s’intéressent à cette
définition sans y adjoindre un discours critique
ou une dose de dérision. On peut dire que la
plus grande partie des critiques adressées à la
recherche du bonheur consiste à mettre en évidence
des contradictions et des obscurités puis à en
déduire des impossibilités.
À l’instar de la première édition
de la MANIF D’ART, la seconde conservera un aspect
festif. Nous aborderons d’ailleurs cette thématique
selon trois vecteurs, qui nous apparaissent indissociables.
D’abord, la critique du bonheur : sa face cachée,
sa faillite, son aveuglement. Ensuite, le bonheur
d’expression.
Une autre acception du mot bonheur, en effet, se retrouve
en esthétique : « […] elle désigne
un effet artistique qui par son intensité, en
contraste avec l’extrême simplicité des
moyens, donne l’impression d’une réussite
spontanée et presque fortuite1. » Enfin,
la définition la plus commune du terme bonheur désigne un « événement fortuit
favorable ».
Ce thème du bonheur constitue en fin de compte
une possibilité de présenter des artistes
qui décrivent le monde. Une revendication à laquelle
nous tentons de rendre justice par la grande diversité que
propose cette thématique.
1Étienne Souriau, Vocabulaire
d’esthétique,
Paris, PUF.
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